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Compléments

Histoire de la Croatie

Située au carrefour des civilisations qui ont toutes contribué à l’identité européenne, la Croatie a trop souvent été perçue comme une frontière, mais l’ouverture de l’Europe et son indépendance, lui ont permis de dévoiler son riche héritage culturel, longtemps occulté sous différentes identités étrangères.

La naissance de la Croatie


A l'origine, cette région est peuplée d'Illyriens et de Celtes pannoniens. En 35 avant J.-C., Rome l'englobe dans sa province de Pannonie. En 493, elle appartient à l'empire de Théodoric puis à celui de Justinien. Au VIe siècle, les Avars font leur apparition. Un siècle plus tard, des tribus slaves croates venues d'Ukraine pénètrent dans le nord-ouest de l'Illyrie, entre Drave, Save et Adriatique. Ces tribus, organisées en grandes communautés agraires, sont vassales des Avars puis des Francs (806) et des Byzantins (877).

Mais l'influence de Byzance n'est réelle que dans les villes côtières de Dubrovnik (Raguse), Split (Spalato) et Zadar (Zara) jusqu'au milieu du XIe siècle. Christianisés au IXe siècle par les Carolingiens, les Croates se tournent vers Rome et non vers Constantinople comme les autres Slaves du Sud, d'où cette spécificité croate liée à l'aire latine occidentale et catholique. Contrairement aux Serbes et aux Bulgares, les Croates n'ont été qu'effleurés par les influences byzantines et ottomanes.

TomislavEn 880, ils fondent un duché qui devient un royaume indépendant en 925, sous le règne de Tomislav qui se proclame Rex Croatorum. La grande Croatie médiévale durera deux siècles (Xe-XIe). Tomislav Ier s'allie à Byzance contre les Bulgares et agrandit ainsi son royaume. Le roi Drtzislav (969-997) continue la lutte contre les Bulgares, mais Kressimir III (1000-1030) est toujours vassal de Byzance. Son successeur Kressimir IV se rapproche de Rome et de Venise, devenant roi de Croatie et de Dalmatie.
En 1076, Dimitar Zvonimir est couronné à Split par un légat du pape. À sa mort en 1089, l'anarchie règne dans le royaume, et Ladislas Ier de Hongrie pénètre en Croatie en 1091.
En 1102, Kalman de Hongrie est couronné roi de Croatie, et Venise s'empare de la Dalmatie. La domination hongroise durera presque sans interruption jusqu'en 1918. L'influence orthodoxe (alphabet cyrillique, architecture byzantine et liturgie) est combattue et remplacée par l'activité missionnaire des bénédictins, franciscains et dominicains. Au niveau politique, un ban croate résidant à Zagreb, vassal de Budapest, représente le pouvoir royal.

À la suite de la défaite des Hongrois face aux Turcs à Mohacs en 1526, la Croatie est démembrée. Le Sud devient ottoman jusqu'en 1699 (traité de Karlowitz), Venise conserve le Nord et la Dalmatie. Dubrovnik est une république indépendante. Le reste devient terre des Habsbourg. Au XIIIe siècle, l'emprise catholique se renforce et des adeptes de la religion réformée ne peuvent s'implanter. Sous l'influence des jésuites, la langue populaire croate et les traditions slaves se développent.

La Croatie contemporaine


Carte des provinces IllyriennesC'est Napoléon qui va mettre fin provisoirement à cet équilibre. Après avoir défait Venise et l'Autriche, il crée les provinces illyriennes rattachées à l'Empire de 1809 à 1813. La Slovénie, la Dalmatie et une grande partie de la Croatie y sont englobées. Les Français abolissent la féodalité et introduisent le Code civil et l'égalité devant la justice, instaurent les principes du Concordat et le mariage civil, abolissent les privilèges, les corporations et la dîme, dénationalisentles terres au profit de la paysannerie, construisent des routes. Le premier dictionnaire français-croate est publié en 1812. Les ferments du nationalisme croate vont commencer à germer.

Mais c'est sans conteste la révolution de 1848 en Europe qui est le détonateur du mouvement croate. Sous domination hongroise, les Croates préfèrent se rapprocher de Vienne. Le ban Josip Jelachitch, la population croate et serbe de Voïvodine refusent de s'allier à la sécession hongroise. De 1849 à 1867, la Croatie est directement annexée à l'Autriche. Mais le compromis austro-hongrois créant la double monarchie laisse les Croates aux mains des Hongrois. Cela va les pousser vers l'union de tous les Slaves du Sud et vers le futur « yougoslavisme ».

À la suite au démembrement de l’empire des Habsbourg et après la fusion de la Croatie dans une nouvelle union politique que des intellectuels croates avaient appelé de leurs vœux, l’union des Slaves du Sud vit le jour (devenant, en 1929, le royaume de Yougoslavie). Surgirent alors des difficultés qui secouèrent ce nouvel État en raison de traditions politiques et nationales par trop différentes, et qui finiront par alourdir le tragique bilan du XXe siècle européen. Sous l’identité yougoslave, la Croatie se trouva d’un point de vue culturel une nouvelle fois éloignée de son milieu centre-européen.

Josip Broz TitoMalgré une brève période de réalisme socialiste qui accompagna la prise du pouvoir par Tito et le parti communiste en 1945, la situation s’améliora après la rupture avec Staline en 1948, permettant aux artistes de suivre les développements des courants artistiques à l’Ouest.
En 1946, la Croatie devient une des six républiques socialistes de la fédération yougoslave. Sous le nouveau système communiste, la propriété est nationalisée et l'économie planifiée selon un socialisme de marché. Le pays suit une phase de reconstruction après la Deuxième Guerre mondiale, s'industrialise et commence à développer le tourisme.

En 1980, après la mort de Tito, des difficultés économiques, politiques, et ethniques apparaissent et le gouvernement fédéral commence à s'effriter. La crise au Kosovo et l'émergence de Slobodan Milošević en Serbie en 1986 provoquent des réactions très négatives en Croatie et en Slovénie. Tandis que l'emprise communiste est remise en question dans toute l'Europe centrale et de l'Est, les appels à des élections multipartites se font de plus en plus nombreux.
Avec le réveil du nationalisme serbe en 1988, les Croates craignent un renouveau du « grand serbisme ».

La Croatie indépendante


Carte de la Croatie IndépendanteEn février 1989, les Croates fondent un mouvement alternatif indépendant. En janvier 1990, l'ex-général communiste dissident, Franjo Tudjman, crée l'Union démocratique croate (H.D.Z.). Dans la foulée, les nostalgiques de l'Oustacha ressuscitent le Parti du droit.
Aux premières élections libres de mai 1990 en Croatie, le H.D.Z. l'emporte en obtienant 58% des sièges, et Franjo Tudjman devient président de la République. Mais ses déclarations violemment anti-serbes indisposent les 11 % de Serbes qui vivent en Croatie. En août, ces derniers votent pour l'autonomie des régions où ils sont majoritaires.

Les premiers affrontements ont lieu le 2 mars 1991 entre policiers croates et serbes. En avril, la Krajina proclame son rattachement à Belgrade. En mai, 94 % des votants se déclarent pour une indépendance de la Croatie, qui se proclame souveraine et indépendante le 25 juin 1991 ; cette indépendance est reconnue internationalement à partir du début de 1992.

La guerre


La guerre de Croatie, ou guerre d'indépendance croate, s'est déroulée entre août 1991 et novembre 1995, à l'issue de l'effondrement de la fédération yougoslave et a opposé la République de Croatie nouvellement indépendante à l'Armée populaire yougoslave et à une partie des Serbes de Croatie.

En juillet 1991, l'armée fédérale et les milices serbes attaquent la garde nationale et les milices croates. Alors que la guerre a commencé, les trois médiateurs du Conseil européen réunissent Serbes, Croates et Slovènes sur l'île de Brioni dans l'Adriatique, le 7 juillet. Ils décident conjointement d'appliquer un cessez-le-feu et de suspendre les déclarations d'indépendance. Aucune de ces deux résolutions ne sera respectée et le processus d'éclatement de la Yougoslavie se met en marche. Beaucoup de villes croates, notamment Vukovar et Dubrovnik, sont attaquées. Le parlement croate coupe tous les liens subsistants avec la Yougoslavie en octobre de cette même année.

Vukovar pendant la guerreLa population civile fuit en masse les zones de conflit armé : des milliers de Croates immigrent depuis la Bosnie et la Serbie, alors que des milliers de Serbes migrent dans le sens contraire. Dans beaucoup d’endroits, de nombreux civils sont expulsés par les forces militaires, donnant lieu à une véritable épuration ethnique. La ville frontière de Vukovar subit un siège de trois mois, durant lequel la plupart des édifices de la ville sont détruits et une majorité de la population forcée de fuir. La ville tombe aux forces serbes fin novembre 1991. Peu après, les États étrangers commencent à reconnaître l’indépendance de la Croatie. À la fin de janvier 1992, beaucoup d’États du monde entier reconnaissent le pays. En conséquence, les Nations unies imposent des cessez-le-feu, et les protagonistes, pour la plupart, se retirent. L’armée de la République Fédérale socialiste de Yougoslavie (JNA) se retire de la Croatie pour la Bosnie-Herzégovine où la guerre ne fait que commencer. Entre 1992 et 1993, la Croatie accueille des milliers de réfugiés en provenance de Bosnie.

Le conflit armé en Croatie reste intermittent et essentiellement à faible échelle jusqu’en 1995. Début août, la Croatie lance l'Opération Tempête qui vise reprendre le contrôle de la majeure partie des zones contrôlées par la République serbe de Krajina. Cette opération cause un exode massif de la population serbe. Fort de ces succès militaires qui ont permis de récupérer 90 % du territoire croate, le parti H.D.Z. du président Franjo Tudjman remporte les élections législatives le 29 octobre 1995 avec plus de 45 % des suffrages. Un mois plus tard, le 21 novembre, à Dayton (États-Unis), un accord est signé entre Franjo Tudjman, Slobodan Milošević et le Bosniaque Alija Izetbégović, pour résoudre la crise yougoslave. Zagreb et Belgrade reconnaissent l'indépendance d'une Bosnie composée de deux régions : la fédération croato-musulmane et la République serbe de Bosnie. Progressivement, les forces armées serbes vont quitter la Slavonie orientale, permettant aux réfugiés croates de rentrer chez eux.

Bilan de la guerre :
Au total, en cinq ans, l’agression serbe aura causé côté croate 15 583 morts et portés disparus, dont près de 400 enfants, et 37 180 blessés. Les dommages directs et indirects pour l’économie sont évalués à quelque 37 milliards de dollars - presque deux fois le PIB de la Croatie.
En Bosnie, les Croates comptent 9909 tués et 20 649 blessés, 80% d'entre-eux étant victimes de l'agression serbe. Le bilan humain de l'ensemble des opérations de libération menées par l'armée croate en 1995, en Croatie comme en Bosnie, est très lourd : 473 soldats tués au combat et 2017 blessés.

La Croatie actuelle


Depuis 1996, le pays est sorti du marasme économique dû à cinq années de guerre et de destructions. Dix ans plus tard, la croissance est forte (5,3 % en 2003 ; 4,3 % en 2005), la monnaie (la kuna) est stable, l'inflation est de 3,3 % en 2005, mais le taux de chômage reste élevé avec 18 % de la population active. Un des moteurs de cette renaissance économique est sans conteste le tourisme.
La Croatie devient membre de l'OTAN le 1er avril 2009, ainsi que de plusieurs organisations européennes et internationales.
Quoi qu'il en soit, pour le pouvoir croate, l'avenir économique et politique du pays repose sur un arrimage à l'U.E. Zagreb a posé officiellement sa candidature à l'adhésion le 21 février 2003 mais l'affaire Gotovina lui a fait perdre du temps, et l'espoir d'entrer dans l'Union le 1er janvier 2007, en même temps que la Bulgarie et la Roumanie, s'est envolé, malgré un niveau de vie supérieur à ces deux pays. Sa pleine intégration à l'Union européenne est prévue pour juillet 2013.

Ce n’est qu’après la disparition du Rideau de fer, l’avènement de la démocratie et la proclamation de l’indépendance de la Croatie, en 1991, que toutes les conditions furent de nouveau réunies pour une redécouverte de l’identité croate, profondément marquée par l’héritage européen.

Fleche

Pour aller plus loin ... Le dessous des cartes

Le dessous des cartes est une émission de géopolitique et de géographie diffusée sur la chaîne de télévision franco-allemande Arte. En 2011, une émission très instructive a été réalisée sur le Croatie. Ce petit film vous permettra de découvrir, de façon ludique, l'histoire récente de la Croatie et de son adhésion à l'Europe. L’émission a pour particularité d’utiliser principalement des cartes pour visuel. Elle est présentée par le géographe et géopoliticien Jean-Christophe Victor.

Le dessous des cartes - Croatie, à deux pas de l'UE (22.10.2011 Arte)

En 2011, la Croatie a obtenu le feu vert pour devenir le vingt-huitième membre de l’Union européenne. Vingt ans après la guerre qui a conduit à son indépendance, le pays, qui a consenti d’importantes réformes pour intégrer l’UE, va-t-il devenir un nouveau pont dans la relation entre Bruxelles et les Balkans ?

Durée : 12 minutes


Le dessous des cartes - Ex Yougoslavie : Dossier Fractures Historiques

Un documentaires sur l'éclatement de la Yougoslavie....


Source : Christophe Chiclet, « CROATIE », Encyclopædia Universalis [en ligne] (www.universalis.fr)


Dernière mise à jour : 09/09/2016